"Le génie, c'est autre chose que le talent." Serge Gainsbourg
Sony, la vieille maison, a attaqué en justice Udio et Suno, les centaures de la musique générative. Sony qui représentait le futur il y a quelques décennies devient le représentant de l'ancien monde et défend ses droits, qu'il estime bafoué par ces entreprises d'Intelligence Artificielle. ⇒ https://www.usine-digitale.fr/article/intelligence-artificielle-les-grandes-maisons-de-disques-s-attaquent-aux-start-up-qui-generent-de-la-musique.N2215079
C'est à nouveau une querelle des Anciens et des Modernes, avec des enjeux business au moins aussi importants que ceux qui ont été soulevés par l'émergence du streaming...
Au fond, même si les modèles d'IA générative sont une étape technologique fondatrice, l'IA générative dans l'Art n'est qu'une simple nouvelle modalité de création. Un nouvel instrument, comme les synthétiseurs, comme le piano, le violon ou les percussions, si on revient en arrière.
Il faut donc traiter l'IA comme telle : un instrument de découverte et de création.
NOTA BENE : Cet article est rédigé sur le fond de la création musicale, mais les réflexions présentées me semble largement applicables dans leur ensemble aux arts visuels, audiovisuels et littéraires.
Les arguments principaux des ayants-droits artistiques est que les systèmes d'IA génératives ne sont que des "répéteurs" de contenus, à la façon des artistes qui font des "covers" et qui reprennent des oeuvres pour les fixer de façons différentes sur des supports. Ainsi, à leur sens, l'IA n'est qu'un grand blender dans lequel on ne peut produire que des cocktails qui sont des sortes de combinaisons linéaires des ingrédients que l'on mélange.
Avec les premières plateformes de contenus en ligne, il y avait des boucles de recommandations, l'IA mal utilisée aura les mêmes effets, des générations qui seront toujours les mêmes et pas nouvelles.
La force de l'IA générative est de travailler sur des corpus tellement grands qu'ils dépassent ceux auxquels peut l'humain peut être exposé dans sa vie. Ainsi, chaque semaine, ce sont plusieurs millions de titres nouveaux qui sont uploadés sur Deezer (soit au bas mot 208 jours de musiques non-stop). Mais finalement, même si on entraînait une IA générative sur l'ensemble de TOUTE la musique créée par le passé par des humains, on ne pourrait effectivement d'un point de vue technique que créer, de façon très talentueuse, de nouvelles versions des musiques existantes.
Autrement dit, je mets au défi quiconque voudrait générer quelque chose de ressemblant aux Beatles avec, en entraînement, de la musique datant d'avant 1960...
L'humain reste le seul génie possible. Le Génie, c'est la capacité de créer quelque chose de radicalement nouveau et de créer de nouvelles tendances. Même si le mot n'existait pas encore à leur époque, les Mozart, Beethoven, Jean-Michel Jarre sont considérés comme des génies, des trend-setters. Ce sont des pionniers qui ont créé des styles et des pans entiers d'art qui sont radicalement nouveaux. Et ça, l'IA générative au sens stricte ne peut pas le faire, en tous les cas pas seule.
Oui, l'IA va créer des tombereaux de musique jetables. Oui, avec l'IA le nombre d'écoute médian d'écoute par morceau de musique va tomber.
A ce sujet, je vous recommande l'excellent article d'Andreesen Horowitz, qui explique que l'IA va rapprocher le consommateur de musique du producteur.
https://a16z.com/the-future-of-music-how-generative-ai-is-transforming-the-music-industry/
C'est en effet la promesse "retail" de Suno et de Udio ! En effet, avec leur service, il est facile de faire une musique pour le pot de départ de Michel, l'écouter 2 fois, parce que Michel était vraiment un bon collègue et ensuite l'oublier pour toujours...
Pour moi, les 5 éléments qui font que l'IA va véritablement aider à créer les génies musicaux et artistiques du 21ème siècle sont les suivants :